perpetuel Klezmer
Denis CUNIOT, pianiste klezmer
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The Golem on the Moon

(année 2003)

DUO YOMGUIH-CUNIOT

Golem

Sans me vanter, je ne suis ni juif ni musicien. Nous sommes si peu nombreux dans cette situation qu’elle fait de moi un des rares spécialistes objectifs de la musique klezmer. Une vieille histoire juive a connu un certain succès en débutant par « Au commencement... ».

Commençons donc : Denis Cuniot et Yomguih se sont rencontrés au sein du grand groupe klezmer « Orient Express Moving Shnorer ». Un schnorer, c’est un pauvre type, et alors, est-ce une raison pour qu’il vous tape sans cesse ?

Certes, mais qu’est ce que le klezmer ?

Klezmer vient des mots hébreux « kle », instrument et « zemer » pour chanson. C’est une musique juive populaire, que les musiciens klezmer, les klezmorim, jouaient dans les shtetels, dans les ghettos, à l’occasion d’un anniversaire, d’un mariage, ou de l’arrivée d’un nouveau rabbin (voir l’anniversaire de mariage du nouveau rabbin). Sans cesse sur la route, méprisés – il convient de mépriser les amuseurs, on l’oublie trop souvent – les Klezmorim ont sillonné l’Europe centrale. Au hasard des amitiés, des rencontres, leur musique a échangé avec tous les autres, russes, roumaines, grecques, ottomanes ou tziganes. C’est peut être pourquoi, si les musiciens juifs ne sont pas tous klezmer, les musiciens klezmer ne sont pas tous juifs.

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Musique de fusion, le klezmer a bien sûr rencontré le jazz, pour le meilleur. Denis Cuniot et Yomguih, dans The Golem on the Moon viennent le rappeler avec splendeur.

Le golem comme la musique, est création humaine : sur son front de glaise, son créateur, Rabbi Loew de Prague, avait écrit le mot hébreu « emet », « vérité ». Chaque veille de shabbat, le rabbin effaçait la lettre e, afin que seule demeure la syllabe « met », pour « mort ». Le golem s’effondrait et redevenait pour un jour et une nuit une « masse informe ».

Qu’un golem se trouve désormais sur la Lune ne doit pas étonner. Car la musique klezmer ne parle pas que de tristesse et d’errance, comme on voudrait le faire parfois croire. Il y a de la joie dans

ses larmes, du rire dans ses, sanglots (du t.shok dans ses knetsch), et de l’humour jusque dans le virtuose. La musique klezmer nous fait douter de cette certitude absurde d’être né quelque part, elle nous rappelle que tous, comme elle, nous venons d’ailleurs, que cet ailleurs est loin, et qu’il est partout.

Hervé Le Tellier